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Biographe, écrivain public : Philippe Hardy Prioton, ses mots apaisent

Article publié dans le magazine hebdomadaire, le 7 Hebdo le  5 Octobre 2021 

Photo noir et blanc de L'Écrit Vainc

Philippe Hardy Prioton. 48 ans. Biographe et écrivain public sur le tard, installé à Neuville. Ecoute les autres, couche sur le papier leurs récits de vie. La sienne a connu des sinusoïdes. « Beaucoup de personnes qui ont mon handicap sont dans un fauteuil. Je suis un rescapé », philosophe-t-il.

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Est-ce l’effet du confinement ?

Un mal-être latent ?

Une volonté de transmission ?

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Toujours est-il que « les gens » éprouvent le besoin de se raconter. A défaut de rejouer les scènes de l’excellente série En thérapie, ils se confient auprès d’écrivains publics comme Philippe Hardy Prioton. Le Neuvillois à la voix douce et posée inspire confiance. « Les petits parpaings qui peuvent survenir à différents moments de la vie, on a parfois tendance à les occulter. Ce coup d’arrêt (le confinement) les a fait remonter. La période a été propice à l’introspection. » « PHP » comme se surnomme ce féru d’informatique a donc déjà exercé ses nouveaux talents de « biographe-thérapeute », auprès d’une mère de famille dont les enfants ont été victimes d’attouchements, d’un chirurgien esthétique « envoûté »... Des mots pour soigner les maux, en somme.

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« Ce métier m’a appelé »

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Le fils d’instituteur « amoureux de la littérature » éprouve du plaisir à écouter les autres. Il n’était pourtant pas destiné à cette nouvelle carrière, démarrée officiellement le 02.02.2020. Superstitieux, passez votre chemin. L’homme à la barbe fournie et à la casquette protectrice a travaillé pendant douze ans dans un centre de relations clients. L’histoire s’est arrêtée un peu brutalement. Et au carrefour de sa nouvelle vie professionnelle, un bilan de positionnement l’a amené à choisir entre deux suggestions : art-thérapeute ou écrivain public. Son cœur a penché vers la seconde. « Ce métier m’a appelé en quelque sorte !» Au-delà des biographies, L’Ecrit vainc propose à l’écoute des livres audio -L’Ile au trésor de RL Stevenson-, s’apprête à lancer des ateliers d’écriture, multiplie les lives sur Skype pour parler de son métier... Bref, « PHP » se démultiplie.

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Et lui alors, a-t-il déjà imaginé se raconter dans un livre ? « J’ai écrit une cinquantaine de pages aux urgences du CHU, en octobre 2020. Il est probable que j’aille au bout », glisse-t-il avec le sourire. L’enfant de Lencloître est une sorte de miraculé, ou plutôt de rescapé. Il est né avec une malformation congénitale, une hernie de la moelle épinière. Spina bifida de son nom latin. « La plupart des personnes qui ont mon handicap sont en fauteuil roulant. Moi, j’ai la chance de marcher, avec une canne certes, mais de marcher. » Une quarantaine d’opérations et « beaucoup de rééducation » l’ont préservé d’une invalidité totale. « C’est peut-être pour cela que je ressens les douleurs des autres, je les comprends. Mes interlocuteurs ressentent cette empathie, une certaine bienveillance. »

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« Le temps qui passe, du bonus »

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Avec du recul, le dernier d’une fratrie de quatre (deux frères, une sœur) estime être « bien né » dans une famille aimante. Sa mère, avec laquelle il a entretenu « une relation fusionnelle », jusqu’à son décès en 2017, s’est même résolue à laisser sa « petite épicerie » de Lencloître pour veiller sur sa progéniture. « On m’a transmis de belles valeurs... » Elles lui ont servi dans sa vie d’ado et d’adulte, parsemée comme tout à chacun d’écueils. Lui qui se rêvait « Paul McCartney ou Mick Jagger », a passé un bac A2 et « adoré l’anglais », s’est forgé dans la difficulté. « J’ai toujours été un peu le mouton noir. J’ai dû me battre. » Ses gros pépins de santé -« on ne me donnait pas six mois de vie »- ont modifié son rapport au temps. Définitivement. « Petit, j’avais une peur panique de la mort. Aujourd’hui, je me dis que le temps qui passe est du bonus. Je vis l’instant présent comme si c’était le dernier. »

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En dépit d’une sensibilité au développement personnel, Philippe Hardy Prioton se reconnaît volontiers « colérique et vindicatif ». Il exècre l’injustice et la mauvaise foi. Mais sa nature profonde incline davantage à la tempérance. « Je n’aime rien tant que la sincérité et les vrais rapports humains. » L’Écrit Vainc connaît le sens des mots et leur pouvoir. Dans son vocable, le « parpaing » est ainsi un matériau à la fois pesant et synonyme de (re)construction. Sûr qu’il figurera en bonne place dans son autobiographie.

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Arnault Varanne - Le 7

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